Cette décision marque un tournant dans la recherche de justice pour les victimes des violences récurrentes dans cette région dévastée par des conflits armés.
Un contexte de crimes persistants
Les autorités congolaises ont sollicité à deux reprises l’intervention de la CPI. La première demande, soumise en mars 2004, portait sur l'ensemble des crimes relevant du Statut de Rome commis sur le territoire de la RDC depuis juillet 2002, date à laquelle la Cour a acquis compétence dans le pays. En juin de la même année, le Bureau du Procureur avait lancé une enquête sur la situation générale en RDC.
Le second renvoi, présenté le 23 mai 2023, concerne plus spécifiquement les crimes commis dans le Nord-Kivu par divers groupes armés depuis janvier 2022. Ces actes de violence s’inscrivent dans un schéma de conflits récurrents dans cette région, où des forces militaires et des groupes rebelles sont accusés d’exactions, y compris de massacres, de violences sexuelles et de déplacements massifs de populations.
Évaluation des liens avec les enquêtes en cours
Le Bureau du Procureur a conduit, au cours des derniers mois, une évaluation préliminaire des crimes commis dans le Nord-Kivu, afin de déterminer s’ils entrent dans le cadre de l'enquête déjà en cours en RDC. Cette évaluation a conclu que les violences récentes dans cette province sont directement liées aux cycles d'hostilités et de violences qui sévissent dans la région depuis 2002.
"Ces crimes, bien qu'ayant eu lieu après le début des enquêtes, s’inscrivent dans des schémas similaires à ceux que nous avons observés depuis longtemps", a précisé Karim Khan dans un communiqué. Par conséquent, les crimes présumés commis depuis janvier 2022 seront intégrés à l’enquête initiale, élargissant ainsi le champ d’action de la CPI.
Une enquête impartiale et globale
Le Procureur de la CPI a insisté sur l’approche impartiale et exhaustive de l’enquête. Celle-ci ne se limitera pas à un seul groupe ou à des acteurs spécifiques du conflit. L'objectif est d’établir la responsabilité de tous les auteurs présumés, quels qu'ils soient, et de rendre justice aux victimes de manière équitable.
Vers une justice complémentaire
Le bureau du Procureur a également souligné l'importance de la complémentarité dans l’administration de la justice. Cette approche vise à encourager la coopération entre la CPI et les autorités nationales congolaises, ainsi que d'autres acteurs pertinents, afin de garantir une justice efficace pour les victimes. "Mettre fin aux cycles d’impunité ne peut se faire que par un effort concerté entre la RDC, mon Bureau, et la communauté internationale", a déclaré Khan.
Le Procureur a conclu en appelant à une stratégie de justice transitionnelle durable et viable en RDC, soulignant que la CPI et la communauté internationale ont un rôle crucial à jouer pour soutenir ces efforts.
Un chemin encore long
Bien que cette annonce soit un signe positif dans la lutte contre l'impunité en RDC, la route vers la justice reste semée d’obstacles. Les conflits dans l’Est du pays, notamment dans le Nord-Kivu, continuent de faire des ravages parmi les populations civiles. L’engagement renouvelé de la CPI sera un test de la capacité de la communauté internationale à répondre de manière appropriée à ces défis humanitaires et judiciaires.
Cette relance des enquêtes pourrait renforcer les efforts en cours pour une justice transitionnelle et, à terme, contribuer à une paix plus durable dans une région où la violence reste endémique.